Irréversible Voyage

Irréversible Voyage 2

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Vous avez pris cette route depuis si longtemps. Vous ma famille ancestrale, ni mon frère ni ma sœur, ni mon sang de même couleur, je ne me souviens pas de vous.
… Et pourtant, nos racines battent d’un seul cœur et nos yeux, du Nord au Sud, cherchent égoïstement dans le bleu du ciel l’éclat d’une étoile paisible. Un Éden qui à la naissance nous fut promis.

Mais vous sourit la lune dans les flaques de pluie aux portes du malheur. Vous avez pris cette route depuis si longtemps.

Aujourd’hui, il me reste peu de mots, si peu d’empathie pour écrire le chemin de vos vies. Indicible tristesse au fond de vos prunelles où j’ai jeté mon regard sans jamais m’y reconnaitre.
Je vous demande pardon pour mes faiblesses. Pour avoir confondu émotion et compassion.
Étourdi au jeu du Colin-maillard par la rotation de la terre, je me suis perdu. De ces paysages lointains du jardin que j’ai cru éternel, je ne reconnais plus rien.
Suis-je devenu sourd et aveugle ?
Un animal tombé dans l’aliénation de toutes les valeurs qui me rapprochaient de l’humain ?
Ai-je oublié que nous étions nés démunis de la même Mère. Celle qui répond avec amour, avec tendresse, quand on l’appelle ?

L’innocence de l’enfant ne peut résister au souffle mordant du temps et cette vieillesse qui avance, chaque jour, irrémédiablement, me fait silence.

Vous avez pris cette route depuis si longtemps ! Courageusement.
Vers de sombres inconnus, vos ombres fatiguées se dessinent sur les dunes du terrible désert, à travers les mers, tenant dans les mains une simple lueur de survie. Radeau de lumière fuyant guerres et misères de vos terres.
Réfugiés ou exilés, vos souffrances piétinent les fleurs de nos consciences ayant, avec les années, perdu l’unique direction. Peu importe les détours, les maux de la résignation noircissent l’humanité, bleuissent nos peaux ridées.

Nous avons pris la route chacun de notre côté. Sans jamais nous regarder. Pourtant, nous suivons le même chemin. Celui menant vers un horizon funèbre où tous les soleils s’éteindront dans les ténèbres. Nous, qui sans exception seront à la dernière heure,  les exilés de nos vies … des réfugiés dans la mort.

Vous avez pris cette route depuis si longtemps. Toi ma famille ancestrale, mon frère, ma sœur, mon sang de même couleur, je me souviens de toi ! Il est temps de nous aimer.

12-2016 © Manache Poetry

merci

 

Paroles / Lyrics

Lagi/ Réfugiés
~ Aziza Brahim
Depuis que je suis arrivée dans ce monde
J’ai vécu en tant que réfugiée.
Malgré le départ vers le Nord
Je suis restée réfugiée.

Vivre dans une haima (tente)
Usée par le temps
La haima, témoin de ma sensibilité et de ma foi.
Regardez combien d’âmes désirent
Enfin retrouver les yeux qui les attendent.

Ici, ils sont de Côte d’Ivoire,
Ils sont réfugiés.

Chaque année, nous le voyons au Soudan,
Une nation de réfugiés.

Dans n’importe quelle ville de Palestine
Ici, ils sont des réfugiés.

Les troubles se répètent au Mali,
Ils sont des réfugiés.

Et les gens
Ici ils sont, blessés,
En Algérie, comme des réfugiés.

Et la résistance sahraouie
Aujourd’hui en Algérie,
Réfugiés.

6 commentaires

  1. charef dit :

    Adam et Eve sont les premiers réfugiés accueillis par la planète Terre.

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    1. 🙂 Oui, nous sommes tous de la même mère … Merci Charef pour ta lecture commentée
      Bonne année 2017 🙂

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  2. moimarion dit :

    oui nous somme chacun des exiles, refugees, thank you for this. God bless you my dear friend ❤

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    1. Merci Moima pour ta lecture. Bonne année 🙂

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  3. Toute la douleur sourde de l’exil exprimée ici, dans ce billet, par tes mots, et dans ce chant… Une douleur, un arrachement que chacun peut imaginer, mais pas vraiment en percevoir ni le poids, ni le choc… Merci Manache, merci pour tous nos Frères déracinés…

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    1. … en effet, nos frères et sœurs sur la route en ce début d’année.
      Merci pour ta lecture 🙂

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